À mon sens, un texte paru le 9 juin sur Cyberpresse*, « Le Québec n’a pas d’argent… Vous voulez rire? », jette un éclairage nouveau sur (entre autres) la croisade québecorienne contre les subventions à la culture et pour celles demandées pour la construction d’un futur amphithéâtre à Québec :
Depuis 1995, le Québec a accordé entre 75 et 120 milliards de dollars en subventions aux entreprises, selon différentes études. Après l’échec du Oui, en 1995, Lucien Bouchard devient premier ministre et met en place l’agenda néo-libéral du Parti québécois (PQ) sous le slogan du «déficit zéro». Le rôle de l’État change de façon radicale et la social-démocratie en prend un coup. Remplacé par Bernard Landry, l’État se positionne de plus en plus comme la vache à lait de la grande entreprise, non plus sous forme de garanties de prêts par les banques ou de prêts par la Caisse de dépôt, mais sous forme de subventions directes et indirectes, et de crédits d’impôt. Sans le savoir, le contribuable va payer une bonne partie des salaires des Ubisoft, CGI, IBM, GM, Vidéotron ou Olymel de ce monde… La plupart des Québécois ignorent même qu’ils paient entre 60 et 65% des salaires de recherche des grandes compagnies pharmaceutiques, qui nous revendent les médicaments à gros prix.
L’arrivée du Parti libéral (PLQ) au pouvoir n’a rien arrangé. Jean Charest met en place les concepts de réingénierie de l’État et de partenariat public-privé. Le démantèlement de l’État s’accentue avec son lot de favoritisme, de collusion et parfois même de corruption. Convenons que le tout était déjà commencé sous l’ancien gouvernement péquiste. L’opposition Marois ne propose rien de nouveau et se garde de remettre en question sa position économique qui, dans les faits, se confond avec celle du PLQ.
Le reste du texte est absolument à lire et démontre bien que ce ne sont pas les subventions à la culture qui sont l’ultime pompe à cash…
Pointer les artistes sert bien à diriger l’opinion publique et à les mettre en rivalité avec ce qui semble cimenter le mieux le consensus social, soit le hockey. Que l’on parle de culture ou de sport, il reste que ce sont toujours de subventions dont il est question. Et même, de subventions à des entreprises. Et qui dit subvention, dit aide. Ça serait déjà hypocrite que de les mettre sur un même pied d’égalité, mais, encore plus, on isole la culture pour lui lancer des tomates…
Serait-ce le fruit du hasard?
*Découvert via le compte Twitter du poète Tony Tremblay
Il suffit de penser à ce que nos artistes et artisans auraient pu produire avec les investissements de nos gouvernements dans le gigantesque atelier de peinture de la GM à Ste-Thérèse (qui a servi quelques années à peine…)
Comme quoi les subventions à la culture ne sont utiles que parce que d’autres sommes d’argent volé sont détournées pour des inutilités corpo-fascistes…
« Convenons que le tout était déjà commencé sous l’ancien gouvernement péquiste. »
Euh, pas exactement. Oui, le PCul a sombré dans cette merde mais n’oubliez pas le gouvernement libéral de 1985-1994, très corpo-fasciste lui aussi, et dont le très social-médiocrate Thomas Mulcair (sic) a déjà défendu son bilan:
http://anarchopragmatisme.wordpress.com/2011/04/18/lopportunisme-crasse-de-thomas-mulcair/
Quoiqu’au fond, il y a aussi eu le PCul, cuvée René Lévesque (un ex-libéral), et le « fourrage-de-système » qui a mené à l’enrichissement de l’affairiste Labeaume:
http://anarchopragmatisme.wordpress.com/2009/10/29/labeaume-fourreur-systeme/
Comme quoi l’origine de la social-corpocrassie est moins récente que l’on croit…
L’artiste est un symbole. S’attaquer à lui c’est livrer un message. Or quel message veux envoyer notre gouvernement en faisant cette chasse aux sorcières de ce qui encrasse(rait) l’état? Bien sûr qu’il est là pour le peuple, là pour le concret, là pour la sécurité du peuple, là pour son argent, là pour lui garantir prospérité. Mais surtout le message c’est: Nous n’avons plus de temps/argent à consacrer à des arts ou à l’identité nationale, à l’éthique ou encore aux loisirs. Tout ça sous-tend l’idée que la valeur principale de notre société n’est pas l’accomplissement de l’homme mais son labeur. Labeur qui, selon ce schéma de pensée, mènerait (et oui) au bonheur.
L’entreprise promeut, dans une certaine mesure, un type de travail qui plait à nos têtes dirigeantes. (demandons-nous pourquoi…) C’est pourquoi il est subventionné. Mais en plus, l’entreprise agit en tant pas de corrupteurs de l’état mais il s’en sert comme comme un outil. en ce sens Lucien bouchard avait raison de dire que l’entreprise est une personne avec des droits, et son droit premier est, dans notre système actuel entendons-nous, de veiller à sa conservation, à son développement (quitte à éliminer les plus faibles) et d’accumuler des biens. En ce sens, il est semblable à l’état, sauf que nous présuposons de l’état qu’il ne veux pas principalement son profit et son bien en propre mais celui des hommes qu’il gouverne. Or, ce n’est plus le cas et on assiste de plus en plus à la formation d’État-Entreprise (selon la vision que j’en donnait plus haut). Or l’État-Entreprise doit, pour sa survie, promouvoir les mêmes valeurs que l’entreprise, tout en gardant son peuple dans un relatif état de complaisance (d’ailleurs en le détournant des arts qui ne promulgent pas ses valeurs, ou en lui prodiguant des soins de premières nécessités en d’autre terme: du pain et des jeux, ajoutons: la santé, le confort, le bien-être, l’argent assez pour vouloir travailler encore plus).
Notre État est une entreprise comme une autre, donc, aussi achetable qu’une autre.
L’artiste est une cible idéale pour le politicien qui cherche à plaire en provoquant l’indignation. L’artiste mène une existence qui le distingue des autres citoyens. Il est visible, médiatique, cosmopolite. On le suppose oisif, porté sur la rêverie, peu productif. Un BS de luxe, quoi.
On peut toujours trouver un exemple d’artiste un peu crackpot qui produit des œuvres incompréhensibles et s’en servir pour généraliser. C’est un procédé classique. Peu de politiciens résistent à l’envie de se faire du capital politique sur le dos d’un artiste. Gérard Deltell qui fesse sur Xavier Dolan, ça fait les manchettes !
Il y a tellement d’autres secteurs autrement plus consommateurs d’argent public qui mériteraient d’être revus et asséchés avant de s’en prendre à ceux qui soutiennent la création artistique…
Le Québec n’est pas mieux que le ROC et USA sur certains points, comme cet anti-intelectualisme de la droite. Populisme crasse.